Darth's Blog

Les blogs photo, c’est le mal!

Si vous lisez ces lignes, c’est que vous n’êtes pas sans savoir que je suis blogueur, c’est même une grande partie de ma vie à l’heure actuelle, ou alors vous êtes tombé ici au hasard et dans ce cas je vous dis bienvenue.

Sans vous refaites l’historique de mon site qui traine ci et là sur mon blog, il faut savoir que le 19 octobre prochain le Darth’s Blog va fêter ses six ans, six années à parler photo, à vous faire partager ma passion à travers mes explications techniques, mes jeux, mes tests, mes coups de cœur et mes coups de gueule et même depuis peu grâce à la vidéo.

En tant que photographe, j’ai comme beaucoup de mes « semblables » amoureux de l’image fixe quelques repères, quelques manies, des points fixes dans le temps, des rendez-vous rassurants, qui ponctuent ma vie de passionné.

Un de ces rendez-vous, c’est le magazine photo Chasseur d’ Images, un mag que je suis depuis tellement longtemps que je n’arrive plus à me souvenir quand je me suis offert le premier numéro.

Je me souviens de ce sentiment, les yeux brillant et admiratif, me dire que ceux qui travaillaient pour cette rédaction étaient certainement les gens les plus chanceux de la terre, des icônes pour moi, Ronan ou Guy-Michel, mes héros, ils avaient tant de chance de pouvoir tester tout ce matériel, de vivre de leur passion. À cette époque j’étais un gamin et je ne savais pas, je ne me rendais pas compte que c’était surtout dû à un travail énorme, plus qu’à un gros coup de chance.

Cela n’enlève rien au rêve, cela n’enlève rien au fait que l’on désire suivre une sorte d’exemple, même quand on finit par se rendre compte des difficultés.

Puis le temps passe, les idées évoluent même si les rêves restent les mêmes, entre amour et temps orageux, ma relation avec CI aura connu des hauts, des bas, d’autres hauts et d’autres bas, mais dans l’absolu, on a toujours gardé une entente cordiale et j’ai toujours gardé ma pointe d’admiration pour ce journal (et ses journalistes) auquel je suis toujours abonné, un abonnement qui, d’ailleurs, n’est pas limité et se prolonge de façon automatique de mois en mois.

CI et moi, c’est presque l’histoire d’un vieux couple, parfois de très bons souvenirs comme la blague du premier avril faite avec Guy-Michel sur mon blog ou encore le débat très intéressant sur la rémunération des portfolios quand Nat’Image est sorti. Puis parfois plus difficile, quand Guy-Michel m’a reproché de ne pas avoir conseillé CI sur un de mes articles, qui parlait justement des magazines photo. On s’est expliqué de façon tendue, mais courtoise et je pense qu’il a fini par comprendre que pour moi CI n’était pas conseillé (mais largement cité) car c’était une évidence, ce mag fait partie de ma vie depuis aussi longtemps que ma passion pour l’image, l’un ne va pas sans l’autre …

Je lis d’ailleurs toujours avec le même intérêt les éditos de Guy-Michel, que ce soit ceux de Nat’Image ou ceux de CI. Le dernier de Nat’Image était fort intéressant et posait le doigt sur un vrai problème expliqué avec talent par Guy-Michel, un point de vue que je partage. Je ne peux que vous conseiller de le lire.

Parfois pourtant, je lis ses éditos et je ne suis pas forcément d’accord avec sa vision des choses, sa façon de penser, mais dans l’ensemble, ce que j’aime, c’est qu’il donne son opinion, juste son opinion, une vision personnelle des faits, il reste droit dans ses baskets, il dit ce qu’il pense avec une belle franchise, ce sont ses idées et son droit de les exprimer dans son magazine.

Pourtant, son dernier édito, celui du numéro 366 de Chasseur d’Images – que j’ai lu avec pas mal de retard, du fait que je n’avais pas reçu ce numéro et que le service abonnement a dû me le renvoyer -, m’a fait sourire et j’avoue, j’ai trouvé qu’il n’était pas très objectif, empreint d’un jugement sévère sur les blogueurs tous mis dans le même panier … un panier pas très agréable, même voire plutôt péjoratif, jugement émis sur des bases un peu brumeuses, sans qu’il nous donne la source de telle affirmation.

Pourtant, tout commence plutôt bien, il ouvre son texte avec une phrase assassine, celle du lecteur qui dit que les mesures de labo ça ne l’intéresse pas. Une phrase laissée sur le forum de CI, une phrase que l’on voit souvent il est vrai et donc on devrait lui donner l’importance qu’elle mérite, soit aucune. Droit derrière, il explique que plusieurs lecteurs pensent que les tests du magazine sont biaisés, que CI est vendu à certaines marques.

À la lecture de ces premières lignes, j’éprouve une certaine empathie pour Guy-Michel, je me dis, ça fait plus de trente ans qu’il fait ce boulot, il doit vraiment en avoir plein le dos (le tout bas du dos) de voir son travail si constamment remis en question, sur des affabulations de lecteurs frustrés.

Je le comprends, d’autant plus facilement qu’il m’arrive parfois de recevoir des courriers ou de lire des commentaires sur des forums (où ailleurs), qui remettent en question mon objectivité face aux tests que je fais, qui sous-entendent que je suis à la botte de certaines marques. C’est toujours décevant quand on sait le travail qu’il y a derrière chaque test et je me mets à la place des journalistes de CI, qui subissent ça depuis bien plus longtemps que moi et je trouve ça injuste et triste pour eux.

Comme je le dis très souvent sur mon blog, tout aussi souvent sur les forums ou sur Facebook et Twitter, je ne fais pas de tests labo, car d’autres le font bien mieux que moi. C’est pour cette raison que mes tests se contentent du vécu d’un photographe sur le terrain. Rien de plus, rien de moins, et je suis transparent là-dessus. Je n’ai jamais prétendu que mes tests étaient plus ou moins valables que ceux faits dans un labo, aux contraintes, j’ai toujours affirmé que les uns sont complémentaires des autres.

En bref, j’étais plutôt triste de lire ça, car je sais à quel point c’est pénible de se faire remettre en question sur son objectivité … pourtant ma tristesse n’a pas duré longtemps, il faut dire que le paragraphe suivant de l’édito était plutôt croustillant, je me permets un petit extrait :

[… Ah ! les blogueurs, comme on les aime… choyés par les marques qui voient en eux des porteurs de bonnes paroles et une source facile de –like- et de référencement google …] [… Grâce à quelques invitations, prêts ou autres faveurs, certains sont devenus les fous du roi des temps modernes, flattant le doux seigneur dans l’attente d’une caresse…]

Guy-Michel Cogné

Ouch … pas gentil, gentil ! Le blogueur ne serait qu’un pion entre les mains des marques, manipulé grâce à quelques faveurs …  Aie …

Je vais revenir sur ce passage un peu plus loin, car pour ce qui est du reste de l’édito, il sonne très juste, et quand il explique que tout se mesure sauf « l’affectivité » que l’on peut avoir pour un produit, il a 100% raison, quand il souligne le côté étrange de faire la queue devant un magasin au milieu de la nuit pour obtenir le dernier produit d’une marque, il a encore raison, quand il explique ne pas comprendre la doudou mania de certains, je l’applaudis, quand il dit que les tests labo sont indispensables s’ils sont pondérés par un test terrain, qui pourra donner un autre angle à l’analyse purement laboratoire, il a encore une fois raison. Les deux vont de pair, un test terrain fait avec sérieux sera toujours un très bon complément d’un test labo, l’inverse étant aussi vrai.

Voilà le genre de propos que j’aime lire de la part de Guy-Michel, cette façon qu’il a de conter les choses pour dénoncer certains faits, voilà aussi pourquoi je n’ai pas compris cette attaque sévère sur les blogueurs, car ce n’est pas le genre de choses qu’il a l’habitude de faire …

Alors, il ressort qu’après cette lecture je me suis posé deux questions:

La première, est-ce que quelque part je dois me sentir visé ?

Ce serait terriblement prétentieux de ma part de dire oui, car au final, il est fort probable que Guy-Michel n’avait pas du tout en tête ma personne en écrivant ces mots. Je ne suis pas le seul blogueur francophone et encore moins le seul à tester du matériel, même si je fais partie clairement des plus gros blogs du genre.

De plus, il est vrai que pas mal de marques draguent les blogueurs en ce moment, Sigma France va clairement à leur rencontre, donc, pas de quoi se faire des films et de jouer les paranoïaques de service, cette mise en cause des blogueurs était sans doute générale.

C’est donc le cœur serein, en paix et donc avec tout le recul nécessaire que je peux me poser la deuxième question – sachant que l’édito visait large les blogueurs qui testent du matériel, je me suis demandé:

Pourquoi Guy-Michel a-t-il balancé aux blogueurs photo une telle claque dans les dents ?

Car, il  a mis aux blogueurs photo un beau revers de la main, une sèche et sonnante qui laisse la trace sur la joue ! En expliquant que les blogueurs étaient (ou pouvaient être) à la botte de certaines grandes marques … ouch … il n’y a pas été de main morte, mais pourquoi une telle réaction ?

J’avoue que je suis resté perplexe un long moment, comment peut-il nous expliquer que c’est ridicule de penser que son journal est vendu aux marques – avis que je partage -, pour dire quelques lignes plus loin que les blogueurs le sont ?! N’est-ce pas un peu contradictoire de pleurer sur l’injustice de propos sans fondement dans un paragraphe pour faire de même dans le paragraphe suivant ?

Cette théorie du blogueur vendu, c’est une idée qu’il a été chercher je ne sais trop où, une affirmation sans arguments solides pour l’étayer et qui manque cruellement d’objectivité – ou qui en a tout autant que ceux qui affirment que CI est vendu aux marques … -, on ne peut tout simplement pas balancer une telle affirmation juste comme ça, sans apporter quoi que ce soit de concret et faire des blogueurs une sorte de sous-catégorie !

Ce genre d’agissements a couté très cher à la presse spécialisée dans les jeux vidéo, qui à force de dénigrer les blogueurs défendant leur média plutôt que d’avancer en parallèle avec eux, s’est retrouvée à ne plus avoir de lecteurs, qui ont préféré se tourner ailleurs … il ne reste presque plus que des ruines de cette presse spécialisée.

Le monde de la photo n’en est pas encore là heureusement! Mais il ne devrait pas imaginer qu’il ne risque rien.

Pour illustrer mon propos, je vais prendre l’exemple de mon site, car c’est celui que je connais le mieux, de plus, il n’y a pas non plus en Europe 200 blogueurs francophones qui testent du matériel.

Mon premier test effectué grâce au prêt d’une marque a été celui du Canon EOS 600D le 28 juin 2011, il y a trois ans de ça. Quand on sait que mon blog fêtera ses 6 ans le 19 octobre prochain, on comprend vite que ce n’est pas d’un coup de baguette magique que j’ai obtenu la confiance des grands noms de la photo.

Il faut dire qu’il y a quelques années, en tant que blogueur, cette confiance n’était pas au rendez-vous, les grandes marques nous regardaient du coin de l’œil en se demandant si notre média avait vraiment un avenir, si on était des candidats sérieux.

J’ai dû pas mal trimer pour montrer mes connaissances techniques et mes capacités à produire des tests qui soient dignes de ce nom et qui pourraient être une référence dans le domaine. Vulgariser des points techniques de la photo pour les rendre accessibles à tous a été un des points forts du blog.

C’est grâce au soin apporté à mes articles que Canon Suisse m’a fait confiance et m’a ouvert la possibilité de tester leurs produits, plus tard, c’est Sigma Suisse qui a su également me faire confiance (merci Christian), puis Vanguard, puis Nikon, puis Fuji, puis bien d’autres.

À l’heure actuelle et grâce à un joli bond en avant en 2014 sur la fréquentation de mon blog, j’ai environ 7’200 visiteurs uniques par jour (un peu moins durant la période estivale), ce qui fait un peu plus de 200’000 lecteurs par mois, soit autant (ou presque autant) que les plus gros magazines photo Français.

Comme je l’ai expliqué dans mon billet : Objectivement objectif, je n’ai aucune raison de ne pas l’être … objectif! Si j’ai autant de lecteurs, c’est bien parce que je donne des avis clairs sans manipulation aucune, j’essaye d’être le plus juste possible et je le fais de façon impartiale.

Pour preuve, je ne travaille pas avec certaines marques qui voulaient avoir la possibilité de relire mes articles avant parution. Je préfère ne pas tester certains produits plutôt que de perdre la liberté de donner mon avis de façon indépendante et sans avoir sur le dos le service marketing d’une marque, qui voudrait contrôler l’information que je peux transmettre.

Si mon blog fonctionne aussi bien, c’est que les conseils que j’ai donnés et les avis que j’ai rendus ont été jugés pertinents par mes lecteurs, sinon, cela ferait bien longtemps qu’ils auraient déserté le navire, on ne retourne pas vers une source d’information erronée, le public est loin d’être stupide.

Quel avenir devant nous?

À l’heure actuelle, ce qui est imprimé vit des jours difficiles, quand on sait que la plus grosse accréditation de la maison blanche est pour un blog, il faut faire attention à l’avenir des magazines papier.

La photo n’est d’ailleurs pas épargnée, les éditions Pearson, qui ont abandonné les livres techniques photo, mon propre éditeur (MA Edition), qui vit une période pénible et de nombreuses librairies, qui nous expliquent qu’ils manquent de clients, ne sont pas là des signes rassurant quant à l’avenir du support papier.

Quand on voit les magazines photo qui apparaissent en kiosque et qui disparaissent quelques mois ou années plus tard, il faut se poser des questions sur le futur de ces publications et regarder s’il n’est pas temps de faire front commun.

Je pense que l’on vit un moment crucial dans le monde de l’édition, les amoureux du papier glacé, des impressions de qualité existent encore – et je suis fier d’en faire partie -, je pense qu’un avenir existe pour la presse écrite, pourtant, je doute que partir en guerre, et de façon frontale face aux médias émergeant, soit quelque chose de positif.

Dans la réalité des faits, on parle tous de la même chose, on parle tous d’un sujet que l’on aime, qui nous tient à cœur et que l’on veut partager avec tous les autres amoureux et passionnés de la photo.

J’imagine que Guy-Michel, pour des raisons qui lui sont propres, devait avoir une certaine rancœur face à un ou des blogueurs et qu’il avait besoin de dire ce qu’il ressentait. Je vois surtout son édito comme une façon d’extérioriser et d’exprimer ce qu’il a éprouvé, comme à travers ce billet, qui devrait être lu par presque autant de monde que  l’édito de Guy-Michel, j’exprime et j’extériorise mes sentiments vis-à-vis de son papier. Il avait le droit de le faire et au final il a très bien fait d’écrire ce qu’il ressent, je me permets juste de dire, sans prétention aucune, qu’il l’a fait de façon un peu maladroite …

Je ne garde qu’une idée en tête, n’essayons pas de juger le travail des autres, ne remettons pas en cause l’objectivité de chacun, le public n’est pas dupe, c’est lui qui au final a le dernier mot, lancer des insinuations ne nous grandit pas, mais au contraire, cela nous fait passer pour des méchants alors que nous ne le sommes pas forcément.

Voilà ce que je voulais dire, je le dis en toute amitié, le cœur léger avec toujours la même pointe d’admiration pour Guy-Michel, qui m’a donné envie de vivre mon rêve en testant du matériel, qui m’a accompagné par ses textes et son magazine depuis de très nombreuses années et qui défend la même passion que moi. C’est d’ailleurs avec toujours autant d’impatience que je vais attendre le prochain numéro de Chasseur d’Images et que je vais lire son prochain édito!

Bonnes photos et bon courage à tous!