Voici une photo que j’ai prise fin septembre. La voiture brulait sur une place de parking sans que personne n’ait réussi à savoir comment le feu avait pris.
J’ai alors appelé les pompiers et réveillé les voisins alentour pour savoir si le véhicule appartenait à quelqu’un.
Les impératifs réglé, et en attendant l’arrivée des pompiers j’ai pris quelques photos (rien avoir, mais c’est là qu’on voit l’avantage de 3’200 iso de bonne qualité)
Aucune victime à déplorer si ce n’est deux voitures qui n’auront pas passé la nuit.
Aurais-je agi autrement s’il y avait eu un véritable accident avec des victimes?
La question que je viens de poser peut vous paraitre difficile. Que faire dans un tel moment?
Ma première publication fut dans la Tribune de Genève. J’ai entendu devant chez moi un grand bruit, je suis sorti précipitamment appareil photo à la main (chez moi c’est une sorte de réflexe).
Arrivé sur les lieux de l’accident, il y a déjà plusieurs personnes qui s’occupent des blessés et j’entends déjà la sirène des pompiers. S’ils sont arrivés si vites, c’est simplement qu’on était à moins d’une vraie minute à pied d’une entrée principale de l’aéroport de Genève Cointrin.
Quand les pompiers sont arrivés, je leur ai demandé s’il avait besoin d’aide. Non, il n’avait besoin de rien. J’ai donc pris quelques photos.
J’ai bien sûr entendu des badauds me hurler dessus. J’étais quelqu’un d’insensible, je n’avais aucun respect…etc.
Avait-il raison?
Avant de vous faire une idée toute faite, attendez la suite.
Dans la soirée j’ai envoyé quelques photos à la tribune, le lendemain une d’elles était publiée.
J’étais donc très heureux de cette première parution. Mais je n’ai pas oublié qu’il me restait quelque chose à faire. Et cette petite chose fut de donner tous les clichés au pompier.
Ils m’ont remercié de ce geste et m’0nt dit que c’était du très bon matériel pour “évaluer” leur réaction.
Comment ne pas être heureux?
Mais avais-je pour autant raison, est-ce que j’aurais dû me contenter de regarder sans prendre de photo par respect ?
Il n’y a pas eu de mort ce jour-là. Mais, est-ce que cela aurait fait une différence?
La question m’a parfois traversé l’esprit. Comment savoir, à quel moment je ne devrais pas porter l’appareil photo à mon oeil que je devrais me contenter d’être un simple spectateur?
La réponse se fait en deux étapes me concernant.
La première étape, c’est que dans ce genre de situation je suis dans un autre monde. Mon objectif est de prendre la photo, ça devient un instinct. Je n’entends plus les critiques des badauds bien pensants, je me focalise uniquement sur mon travail.
La deuxième étape fut plus de relativiser la chose. Est-ce que ceux qui viennent regarder sans prendre de photo sont plus respectueux que moi? Franchement, j’en doute.
Je ne cherche pas à me trouver d’excuse, ni à moi, ni même à ceux qui agissent comme moi, je sais juste que quelque part on témoigne de ce qui s’est passé.
Sans me comparer à un photographe de guerre, l’esprit reste le même, témoigné de ce qu’on a vu, de ce qui est arrivé.
Je sais que souvent pour l’amateur il y a cette gêne, c’est passé par-dessus un tabou, et c’est quelque chose de difficile.
Je ne vais essayer de convaincre personne.
La limite, la photo à ne pas faire, c’est vous qui déterminez ça.
Pour moi, la limite est la portée et le message que peut avoir la photo. Photographier une scène très dure, si je ne peux rien y changer, je vais le faire. (Je ne vais pas prendre de photo au détriment de la vie de quelqu’un, d’abord on pense aux victimes, ensuite à la photo)
Photographier une exécution, même que je ne peux rien y changer, je ne le ferais pas. Car pour moi le message d’une telle photo n’est pas bon et n’apporte rien qu’une mauvaise pub pour ceux qui pratiquent de telles choses.
Pourtant, un autre photographe pensera qu’au contraire, c’est une photo qui fera prendre conscience au monde de ce qu’il se passe ailleurs, le genre de photo qui permet d’ouvrir les yeux.
En conclusion:
Difficile de trouver une conclusion qui tranche. Difficile,je l’ai montré, de donner une limite.
Je sais que chaque personne qui va lire ces lignes aura ses propres frontières.
Donc, un peu facilement pour répondre à la question titre de cet article, je dirais….À vous de voir!
Personnellement j’ai juste appris à ne pas juger, car le chemin qui mène à certaines conclusions n’est jamais le même pour personne.
Bon courage et bonne photo!
PS: promis, le prochain article sera plus léger