Pourquoi vous parler de la mort du reflex?
La raison est simple, c’est un sujet que l’on croise de plus en plus sur les différents forums et autres groupes photo où la mort future du système reflex est évoquée.
L’idée de ce billet est d’essayer de voir si cette mort va vraiment arriver et si oui, quand elle va se produire.
Encore une fois, je m’essaye à l’exercice de la prédiction même si le jeu ne m’a pas toujours réussi, j’en veux pour preuve ma prédiction dans l’article sur le 24*36 face à l’APS-C, à lire ici pour ceux qui ne l’auraient pas déjà fait.
Mais, vous me connaissez maintenant, j’aime prendre des risques et si je veux répondre à cette question, c’est pour le faire de façon très objective au-delà du petit combat que se livre d’un côté les fans des hybrides et de l’autre ceux du “bon vieux reflex”.
Regarder les faits, les analyser avec le plus d’objectivité possible.
Ceux qui me connaissent savent que j’ai en effet un parti pris que je ne renie pas, je vais juste le mettre de côté (autant que faire ce peut) le temps de ce billet, bien que je vous donnerais mon avis “hors propos argumenté” en fin d’article.
Prédire la mort d’un système peut se faire dans différents cas, mais le plus souvent c’est lorsqu’une technologie remplace une autre technologie et apporte un vrai plus, tant et si bien que l’on va abandonner l’ancien système au profit du nouveau.
Dans cette analyse, je vais exprès mettre de côté l’idée d’une certaine “survie”, car oui, il existe des technologies dont on prédisait la mort et qui continue leur vie, mais leur pratique étant restreinte on peut justifier du fait qu’elles ne sont qu’une histoire de passionnés spécialisés.
En photo on trouve les amateurs d’argentique et en musique les aficionados du vinyle, en téléphonie, certains préfèrent la longévité de batterie des petits Nokia aux possibilités offertes par les smartphones.
Pour autant, dans les trois cas, qui nous intéresse on ne peut pas dire que la technologie bien qu’elle survive soit le choix d’une grande part de la population, c’est un choix, qui existe, mais qui reste plus “restreint”, et de toute façon l’idée n’est pas de débattre sur l’intérêt ou non de continuer à utiliser certaines technologies, mais bien la façon dont va se profiler l’avenir sur sa part la plus représentative.
Le postula étant posé, passons à …
L’argumentation :
Il y a plusieurs arguments, qui laissent penser que l’avenir de la photo à objectif interchangeable se fera sans miroir, on ne va pas tous les détailler, car après avoir lu des centaines de discussions, certains arguments sont pertinents et d’autres sont discutables, quand ils ne sont pas simplement faux.
L’un des exemples, c’est la possibilité d’avoir des informations de prise de vue en direct dans le viseur, comme l’histogramme, cet argument serait recevable s’il était totalement illusoire de penser qu’il est possible d’avoir ça sur un viseur optique.
On peut afficher plus ou moins tout ce qu’on veux en surimpression sur un viseur optique et personne ne devrait douter des avancées possibles dans cette configuration, et ensuite, contrairement à ce que l’on pense, on peut extrapoler de façon assez précise un histogramme sans pour autant donner un accès direct au capteur … la technique ici n’étant pas le but de cet article, passons, c’était juste pour vous montrer que certaines argumentations ne tiennent pas la route.
J’ai donc pris le temps de retenir les arguments massue, ceux qui sont indéniables.
Pour bien comprendre la suite, petit jeu de couleur:
- En vert l’argumentation du point de vue de l’hybride.
- En bleu l’argumentation du point de vue du reflex.
La compacité :
C’est l’un des arguments poids lourd (sans mauvais jeu de mots), pour prédire la fin du reflex.
En effet, enlever le miroir reflex, le prisme et toutes l’optique qu’il demande, et vous voilà en possession d’un appareil très compact, gain de place, gain de poids, bref, on réduit le tout.
À taille de capteur égale, on peut vraiment faire plus léger.
La compacité (contre argument) :
Le contre argument de la compacité n’existe pas vraiment, certains vous diront que beaucoup de photographes apprécient le fait d’avoir un appareil avec une certaine stature.
Ce n’est pas faux en soit, je fais partie de ces personnes, mais ce n’est pas un argument, car comme on le sait, qui peut le plus, peut le moins, du coup, il est tout à fait envisageable pour un constructeur de faire des boitiers plus ou moins costauds selon la demande.
La visualisation directe du rendu de la photo :
Avec l’hybride, on a la visualisation directe du rendu de la photo, on sait à quoi va ressembler l’image avant même de la prendre que ce soit sa profondeur de champ, sa colorimétrie, son exposition, les zones cramées des zones bouchées, on a un vrai aperçu de l’image en temps réel.
La visualisation directe du rendu de la photo (contre argument) :
Dans l’absolu, c’est vrai, on a une “visualisation directe du rendu” en temps réel, mais ce n’est pas si évident que ça.
En effet, à l’heure actuelle la visée au viseur électronique s’améliore, mais est loin d’être parfaite.
Le problème vient de la difficulté de rendre la dynamique de l’image réelle, en effet, il peut indiquer une zone bouchée alors qu’elle ne l’est pas ou une zone cramée encore bien exposée.
De même, si on veut utiliser le viseur électronique comme un simple viseur, sans prédictivité du rendu, la dynamique des écrans est trop courte et n’offre pas une lecture suffisante entre les zones claires et les zones foncées.
Sans entrer dans les détails techniques du pourquoi, si je ne doute pas d’une certaine amélioration, il est certain que la visée directe, même si elle n’affiche pas le “futur” rendu de l’image, reste plus confortable.
La vulnérabilité et la limitation du miroir reflex :
La cage miroir et tout son mécanisme induisent une grosse faiblesse dans le système du reflex.
Il faut se dire que de nombreuses pièces sont en mouvement, ce qui provoque des vibrations que n’ont pas les hybrides, ce qui provoque une usure et un risque de panne, que n’a pas l’hybride, ce qui provoque une limitation de la rafale, ce que n’a pas l’hybride, cela provoque un frein pour la prédictibilité de l’AF, ce que n’a pas l’hybride.
La vulnérabilité et les limitations du miroir reflex (contre argument) :
Un des plus gros arguments en faveur de l’hybride, en effet, on ne peut pas nier que tout le système reflex se base sur une technologie avec des pièces en mouvement, de fait, il y a des risques de pannes et bien sûr le fait que chaque fois que le miroir redescend pour permettre à l’AF de faire son travail va limité la rafale.
Le 1Dx avec ses 14 images par seconde flirt avec ce qui peut se faire de plus rapide dans ce genre de configuration et par effet logique, le fait que le miroir doit se relever pour permettre de prendre la photo ralentit les possibilités de l’AF.
La qualité de l’autofocus :
L’autofocus des reflex est largement supérieur à ce qui se fait de mieux en la matière sur les hybride, car l’AF sur le capteur n’est pas aussi performant que la détection de phase des appareils reflex.
La qualité de l’autofocus (contre argument) :
Si à l’heure actuelle, il est évident que la visée directe capteur ne permet pas un AF aussi impressionnant que ce qu’offre les reflex, les progrès effectués sont plus que prometteur.
Si on prend simplement le système dual pixel de Canon, qui en n’est qu’à ses débuts et qui fonctionne de façon plus qu’impressionnante, il est clair que tôt ou tard l’AF des hybrides rattrapera son retard face au reflex et à mon avis, plus tôt que tard.
Après, difficile de prédire lequel des deux systèmes finira par emporter le trophée, mais à mon sens, la visée directe finira par avoir le dernier mot sur cette histoire.
La durée des batteries :
Un reflex est bien moins énergivore qu’un hybride et là ou un hybride sera épuisé, un reflex n’aurait pas utilisé le 1/3 de ses capacités.
La durée des batteries (contre argument) :
C’est l’un des arguments les plus forts et les plus difficiles à contrer!
En effet, un viseur optique ne pompe pas sur les batteries, il ne dépense pas la moindre énergie et même le fait d’activer le miroir ne pompe pas autant sur les accus que la visée directe.
Il n’y a de fait pas de réel contre-argument, si ce n’est la recharge par induction, qui pourrait permettre de recharger l’appareil presque en tout temps, mais cela n’est pas encore arrivé et je doute de voir l’apparition partout, genre au milieu de la forêt.
La prédiction :
Il est difficile à dire quand ça va arriver, mais il est clair que de mon point de vue la visée reflex va se perdre et va finir par devenir une partie très restreinte de la production d’appareils photo.
Les deux géants de la photo n’ont pas encore passé le pas, pas de boîtier haut de gamme chez Canon ou Nikon en mirrorless.
On va dire que c’est un peu eux qui vont signer l’arrêt de mort du reflex, quand ils produiront une gamme complète d’hybrides ce sera le début de la fin.
Il est évident que l’argumentation citée plus haut même si elle semble équilibrée va en faveur du système mirrorless et je ne doute pas que le temps aidant les faiblesses des hybrides soient surmontées par une technologie mieux maîtrisée.
Il faut donc se faire à l’idée d’une mort lente et certaine du reflex, difficile de déduire une date, mais je ne vais pas me défiler et annoncer quelque chose.
Je pense qu’il faudra encore une dizaine d’années pour que le système mirrorless soit proche de la perfection et encore 5ans pour que la production de reflex soit devenue minimaliste.
Je sais que c’est une vision “longue” et que possiblement cela va aller plus vite, mais certainement pas plus lentement.
Mon avis, mes espérances et Conclusion :
J’aime la visée reflex, je suis un vrai amoureux de cette façon de “voir” la photo et à l’heure actuelle je n’ai jamais mis mon oeil dans un viseur électronique, qui m’apporte autant de plaisir et une sensation comparable à un superbe viseur reflex.
Je suis heureux qu’une marque comme PhaseOne soit loin d’envisager une visée électronique et continue à privilégier des viseurs optiques, même si leur vision du futur me paraît le meilleur compromis, j’explique ça tout de suite après.
Je ne rejette pas la visée électronique, je trouve juste dommage que celle-ci n’offre pas un confort de visé à la hauteur d’une visée reflex, et peut-être que psychologiquement j’aime voir ce qui se passe en direct et “en vrai”.
Du coup, l’idée de PhaseOne (dans un futur proche) de faire de vrai viseur hybride, un mélange qualitatif entre le viseur optique et le viseur électronique me semble l’idéale.
Je pousse encore plus loin le délire en imaginant un appareil comme le Canon EOS 1N RS et son miroir fixe semi-transparent, qui sur un appareil numérique pourrait offrir à la fois une visée électronique et une visée reflex.
Le meilleur des deux mondes, avec un écran LCD en surimpression on pourrait avoir un rendu juste extraordinaire et choisir ou non le double affichage, bref, le meilleur des deux mondes.
Malheureusement, je doute fortement que ce soit sur cette voix qu’aillent les constructeurs, ou alors, dans le haut de gamme.
Bref, vous aurez compris que je ne peux pas nier l’avenir de la photo, même si a fond de moi j’espère que cette transition arrive le plus tard possible.
Et de votre côté, quelle est votre vision ?
Sur cette question et ces bonnes paroles, je vous laisse en vous disant bon courage et bonnes photos.