Quand on s’intéresse à la photo, on se rend vite compte que c’est une passion qui peut coûter très cher et parfois, ce boîtier, cet objectif ou encore cet accessoire qui nous fait envie semble inaccessible … surtout si on veut préserver une relation amicale avec sa famille et son banquier.
S’ouvre alors le monde de l’occasion, ce monde fait autant rêver qu’il peut faire peur!
Le marché de l’occasion est le moyen d’accéder à ce matériel inabordable en neuf, mais c’est aussi une vraie difficulté que de trouver la perle rare à bon prix – en se demandant souvent qu’elle est justement le bon prix -, en bon état et sans petite misère, qui nous aurait été cachée.
Sans vouloir faire un article qui se veuille exhaustif sur le sujet, je vais me permettre d’essayer de guider vos pas dans ce monde, qui peut sembler difficile mais qui, au final, ne l’est pas tant que ça !
Le marché de l’occasion, c’est quoi ?
La question peut sembler stupide, pourtant elle a tout son sens, car le marché de l’occasion est vaste, ce marché comprend plusieurs branches, qu’on peut encore diviser en sous-branches, sans aller aussi loin, il faut en connaître les bases pour avoir une vision juste.
Pourtant, avant d’entrer dans le vif du sujet, il faut savoir que le marché de l’occasion est soumis à une règle très simple, que l’on pourrait décrire ainsi:
Le vendeur trouve toujours son prix trop bas, alors que l’acheteur le pense toujours trop haut!
Tout le problème se situe dans le fait que le marché de l’occasion doit faire ses prix en partant du prix du neuf.
Pourquoi ça pose problème ?
La raison est simple, si je suis la marque Canikon et que je sors un nouvel appareil, j’établis un prix précis selon des critères précis. Le prix de revient, ma marge bénéficiaire, j’établis ensuite un prix “conseillé” pour mes revendeurs en tenant compte de leur marge …etc.
Sur le marché de l’occasion, cela ne fonctionne pas ainsi, le vendeur aura acheté son produit un certain prix, il va admettre une décote, mais voudra rentrer dans ses frais. Quant à l’acheteur, il voudra en toute logique payer le moins cher possible, pour lui, la décote lui semblera toujours plus importante, surtout s’il y a un décalage important entre prix le jour de l’achat et celui d’un appareil qui serait en fin de cycle. Typiquement, la personne qui a acheté un 5D MKIII à sa sortie ne l’aura clairement pas payé le même prix que celui auquel il est affiché au moment où j’écris cet article, prix qui sera celui de référence pour le futur acheteur du boîtier sur le marché de l’occasion … le vendeur et l’acheteur restent dans le même esprit, chacun voulant gagner quelques sous.
Si le marché de l’occasion semble opaque, il ne l’est pas tant que ça, quand on sait ce que l’on fait, il ne faut donc pas se laisser impressionner par lui et se laisser prendre au piège cité dans le paragraphe plus haut.
Pour mieux comprendre les choses, nous allons séparer le marché de l’occasion en différentes catégories et on va commencer par …
De particulier à particulier :
Comme son nom l’indique très bien, on parle ici d’une vente hors réseaux de magasins ou de marques, d’un particulier à un autre particulier.
Comment pour tout, il y a des avantages et des inconvénients.
Le principal avantage reste qu’il n’y a pas d’intermédiaire, le prix sera souvent un peu plus avantageux et on a la possibilité de négocier directement avec la personne qui veut nous vendre le matériel convoité.
Le désavantage, c’est qu’on n’a pas vraiment moyen de savoir dans quel état est réellement le matériel, je vous donnerai quelques astuces plus loin pour faire une petite vérification, mais rien ne nous garantit que le produit fonctionnera parfaitement, même pas la garantie constructeur si elle existe encore.
Petite démonstration, je suis un charmant photographe qui veut vendre son magnifique 5D MKIII, il a été acheté il y a un an, la garantie constructeur cours sur encore deux ans, parfait!
Sauf que, ce que mon futur acheteur ne sait pas, c’est que j’ai laissé mon 5D MKIII tomber, à voir, il n’a rien, mais rien, même pas une petite trace, pourtant le choc à abimé une pièce interne, elle tient encore, tant et si bien que lorsque mon acheteur fait ses essais, tout semble parfaitement fonctionner.
Ce n’est qu’un mois plus tard, à force d’utilisation, que l’engin tombe en panne … et là, la garantie n’entre pas en ligne de compte, car c’est bel et bien un cas non couvert par celle-ci.
Alors, je ne dis pas que c’est un cas qui arrive tous les jours, mais il faut quand même garder en tête qu’il existe malheureusement cette possibilité. Parfois, des problèmes surviennent sans que le vendeur soir réellement au courant, il ne faut donc pas imaginer que tous les vendeurs sont des escrocs non plus.
De toute façon, je vous déconseille l’achat de matériel que vous ne pouvez pas tester, donc, il faut clairement privilégier les personnes de votre région, pour pouvoir prendre en main le matériel et effectuer les tests nécessaires pour s’assurer de l’état de votre futur achat.
Passons à la deuxième catégorie …
D’un magasin photo à un particulier :
Dans ce cas l’avantage, c’est que le magasin va garantir la marchandise au-delà de la simple garantie, car normalement et si c’est un bon magasin, il va couvrir les vices cachés.
Ce qui veut dire que si votre appareil tombe en panne à cause d’un défaut imputable au propriétaire précédant, le magasin devrait prendre à sa charge la réparation.
Souvent dans ce cas, l’appareil est en plus vérifié par le magasin même et/ou le service après-vente de la marque, ce qui reste très rassurant.
L’inconvénient, c’est que c’est souvent un peu plus cher, la sécurité à un certain prix, nous parlerons d’ailleurs un peu plus loin de comment savoir quel prix pour un appareil donné.
Attention, certains magasins en ligne font l’intermédiaire entre l’acheteur et le vendeur, cela assure de ne pas se faire arnaquer sur la transaction, car le magasin libère l’argent au vendeur seulement quand celui-ci a le feu vert de l’acheteur, qui a quelques jours pour vérifier le matériel.
Donc, on revient au problème de la vente de particulier à particulier, sans vraie assurance sur la qualité de notre achat, puisque le magasin ne vérifie pas le matériel, qui le plus souvent est envoyé directement par le vendeur à l’acheteur. C’est donc une façon de faire que je ne conseille pas vraiment.
Nous arrivons donc au dernier point …
Les appareils reconditionnés :
Je ne vais pas m’attarder trop sur ce dernier point, pour deux raisons:
- La première, c’est que cela concerne surtout les appareils très hauts de gamme
- La deuxième, c’est que je vais y consacrer un article complet début juin … teaser!
Mais en deux mots, c’est quand une marque, comme Phase One, rachète les appareils de leurs clients qui vont vers un modèle plus récent et que la marque renvoie alors le boîtier en usine, celle-ci va entièrement démonter l’engin pour le vérifier, remplacer toutes les pièces usée ou/et défectueuses, remballer l’appareil et le revendre d’occasion.
Nous dirons que c’est la Rolls de la vente d’occasion, car on peut dire que c’est de l’occasion/neuf, mais comme expliqué plus haut, un article complet viendra sur le sujet en juin.
Maintenant que l’on connait les trois types de vente sur le marché de l’occasion – qui peuvent être encore déclinés en sous-catégories, j’en conviens -, passons au point important …
Comment déterminer le juste prix ?
Estimer le prix du matériel n’est, en soi, pas si compliqué que ça, le prix dépend d’une certaine cote de l’occasion et est directement lié à l’état du matériel.
Pour la connaître la cote du matériel qui vous intéresse, je vous conseille celle de Chasseur d’Images: Voir ICI.
Elle est réalisée en partenariat avec un magasin photo, cela a pour avantage d’avoir une liste très régulièrement mise à jour et cela permet de se faire une bonne idée du prix.
Il faut savoir que le prix affiché est celui que va vous donner le magasin pour racheter le matériel, donc, si vous achetez dans un magasin, le prix sera forcément un peu plus coûteux.
Cela permet aussi de connaître le prix de particulier à particulier, car, sans la garantie du magasin, on va céder son matériel au prix de reprise.
Comme on peut le voir si on clique sur le lien, il y a trois états répertoriés pour le matériel, nous allons voir à quoi cela correspond (le texte est directement pris sur le site de CI):
- Normal : Matériel sans traces de choc, sans rayures importantes ni usure marquée. Avec emballage d’origine, les accessoires vitaux indispensables à son fonctionnement et facture.
- Exceptionnel: Idem, mais matériel d’occasion proche de l’état neuf, très récent ou ayant été très peu utilisé.
- État moyen : Matériel présentant des traces d’usage ou sans l’emballage d’origine, mais en bon état de fonctionnement et avec les accessoires indispensables à son fonctionnement.
Quand on lit cette description, on comprend que le simple fait de ne plus avoir l’emballage d’origine fait descendre le prix, on comprend aussi que sans facture originale, pas de transaction envisageable.
De même, les appareils qui ne sont plus pris en charge par le SAV voient leur décote augmenter de façon tangible.
Nous allons voir, dans le chapitre dédié à l’inspection du matériel, que ces points ne sont pas mis là au hasard et qu’il y a une bonne raison à une décote plus importante, quand des détails, qui peuvent paraître insignifiants, sont présents ou non, comme une petite rayure ou le carton d’origine manquant.
Si le matériel qui vous intéresse n’est pas sur la liste de cotation, il vous reste alors à décrocher votre téléphone et appeler quelques magasins pour leur demander à combien ils reprendraient l’appareil en question, faites une moyenne des réponses pour avoir un ordre d’idée.
Contrôler le matériel :
Quand on achète son matériel en occasion, il faut un minimum de précautions, il ne faut donc jamais hésiter à prendre un peu de temps pour tester ce que l’on veut acheter.
Je vais vous décrire quelques gestes à faire, mais il faut savoir que ces tests ne vous mettent pas à l’abri de problèmes invisibles, qui peuvent survenir bien après l’achat, causés par un accident qu’a pu avoir le propriétaire précédemment.
Ainsi, une simple rayure peut sembler bien banale, mais elle est le signe d’un choc, un choc qui n’aura peut-être pas de conséquences, mais qui peut en avoir. N’oublions pas que nos appareils modernes sont constitués de composants très petits, d’éléments de micro mécanique fragiles, qui ne supportent que très mal d’être secoués ou de recevoir des chocs.
De même, le fait que l’ancien propriétaire garde la boîte d’origine est également un signe que celui-ci est plutôt soigneux, c’est d’ailleurs pour cette raison qu’on y attache tant d’importance, cela peut sembler n’être qu’un détail, mais l’absence ou l’état dans lequel se trouve la boîte d’origine est un bon moyen de savoir quel soin l’ancien propriétaire a apporté à son matériel.
Je ne peux pas faire une liste exhaustive de tests pour tout ce que vous pouvez acheter en occasion, je vais donc me contenter de vous expliquer comment faire avec le boîtier et l’objectif, sachant qu’il suffit ensuite de suivre cette même logique pour tout ce que l’on veut tester.
Le boîtier:
Le premier point à regarder c’est l’aspect extérieur général de l’engin, il ne devrait pas y avoir de rayures et encore moins de bosses, cela est signe que le boîtier à pris des coups et comme expliqué plus haut, on ne sait jamais ce que cela va donner à l’avenir, ceci même si le propriétaire vous assure qu’il a toujours bien fonctionné.
Le revêtement qui se trouve sur le grip est parfois un peu capricieux, il peut se décoller ou encore blanchir, sans que ce soit dû à un mauvais traitement de la part du propriétaire, c’est donc un point qui peut faire descendre le prix, mais qui ne sera pas un frein à l’achat, car les conséquences sont nulles.
Le deuxième point important, c’est de vérifier l’oxydation des contacts, cette opération est rapide, mais capitale, car une oxydation extérieure cache souvent une oxydation des composants à l’intérieur. Retirez la batterie et vérifiez les contacteurs, faites de même pour la monture de l’objectif et les contacts qui s’y trouvent.
Cela était fait, vous pouvez remettre la batterie et allumer l’appareil photo. Prenez une carte mémoire et glissez la dans le compartiment, si tout est ok, formatez la carte et surtout pensez à mettre un objectif.
Avant de continuer la vérification, je vous conseille de remettre tous les réglages à zéro, histoire de ne pas imaginer un problème alors que cela peut venir d’une fonction spécifique.
Vous pouvez maintenant déclencher, faites plusieurs déclenchements pour voir si tout réagit bien. Essayez le mode One Shot tout comme les différentes rafales.
La prochaine étape, la plus longue, consiste à vérifier tous les boutons et tous les modes. Il faut être patient, mais cela est capital. Tous les boutons doivent fonctionner, être souples ne pas gripper, tous les modes doivent également être en parfait état de marche.
Une fois cette étape établie, vérifiez l’autofocus, pas de recette miracle, faites le point, prenez une photo, changez de point et prenez une photo. Faites plusieurs essais pour voir si la mécanique fonctionne, si c’est réactif, si tout semble en ordre.
Les poussières dans le viseur n’ont pas d’influence sur le résultat final de l’image, si vous en voyez, aucun souci à se faire.
Prenez plusieurs photos tests, que vous vérifierez sur un vrai écran et non pas sur l’écran arrière de l’appareil, pensez à prendre des zones uniformes et neutres, histoire de repérer les pixels morts du capteur, s’il y en a, c’est clairement rédhibitoire.
À ce stade, vous devriez avoir une bonne idée de la qualité générale du boîtier, ne soyez pas trop pressé, mieux vaut prendre le temps de vérifier tranquillement, de retourner chez soi pour regarder vos images sur un bon écran, que de vouloir faire “l‘affaire du siècle” tout de suite et de regretter après.
Les Objectifs :
Comme pour tout matériel d’occasion, on doit avoir tous les accessoires, bouchons, sangle, housse de transport …etc.
Le principe reste le même, on vérifie l’aspect extérieur, qui doit être le plus nickel possible, les objectifs dont la peinture part en lambeau sont clairement à éviter, surtout s’il s’agit d’objectifs pro (très souvent les très longues focales), car c’est clairement le signe qu’ils ont été utilisés sans ménagement.
Toujours comme pour le boîtier, on va examiner attentivement tous les contacteurs pour vérifier qu’aucune trace d’oxydation ne soit présente.
La suite sera de tourner les bagues de zoom et de mise au point, elles doivent être fluides, ne pas bloquer, ne pas gripper et surtout ne pas faire de bruit suspect.
On vérifia la lentille frontale ainsi que celle à l’arrière de l’objectif, ce sont les plus accessibles, difficile de vérifier les autres, même avec une lampe de poche, par contre, la lampe de poche permettra de voir s’il y a des traces de champignons, bien que certains endroits seront hors de votre vision. À noter que les micros rayures sont souvent pires qu’un impact, si elles sont nombreuses, elles ont une réelle influence sur le piqué.
Cette étape réalisée, on va monter l’objectif sur un boîtier que l’on connait bien et vérifier que tous les boutons fonctionnent sans problème.
On va vérifier la motorisation autofocus, elle doit être fluide, ne pas faire de bruit étrange.
On va ensuite vérifier que le diaphragme fonctionne bien, on se met sur priorité ouverture, et on appuie sur le testeur de profondeur de champ pour voir si le diaph se ferme correctement aux différentes ouvertures.
On va finalement tester la stabilisation, on la met en route, on regarde que l’image dans le viseur soit bien stabilisée quand la fonction est active.
Pour le reste, il faudra à nouveau vérifier ses images à la maison pour voir le résultat, un manque de piqué flagrant, un décalage important de la mise au point, un manque d’homogénéité sur l’image sont autant de points qu’il faudra vérifier en comparant le comparable.
Il ne serait évidement pas raisonnable de s’attendre au piqué d’un 400mm f2,8 sur un simple 70-300, il faut donc raison garder et se renseigner un peu avant sur les performances que l’on peut attendre de l’objectif que l’on désire acheter.
Pour ce qui est du test des différents …
Accessoires photo :
Il serait illusoire pour moi d’essayer de vous donner des astuces pour tous les accessoires photo, flash, trépieds, filtres, télécommandes … etc, mais ce serait surtout inutile.
Entre mes conseils pour le boîtier et ceux pour l’objectif, je pense que vous avez compris la marche à suivre, l’idée de base pour vérifier que tout est en ordre, il suffit pour le reste de procéder avec la même logique.
En réalité, on ne devrait pas avoir de problème pour vérifier tout ça, si on suit les mêmes principes que l’on vient de voir.
Attention, le bon marché est toujours trop cher :
Comme expliqué plus haut dans l’article, le marché de l’occasion est un bon moyen d’accéder à du matériel qui serait trop cher au prix du neuf.
Si vous passez par un magasin qui vous propose une garantie, vous avez une certaine assurance et c’est réellement par ce moyen que je vous conseille de faire votre achat.
Si vous voulez passer de particulier à particulier, sans vouloir jouer les paranoïaques, gardez à l’esprit que le risque augmente, je vous invite donc à être vigilants.
Un 300mm f/2,8 L IS USM vendu 1’500 € est une utopie, si la personne le vend aussi bon marché, on peut être certain qu’il y a un doute à avoir.
Certes, il y a des exceptions et parfois des occasions extraordinaires, c’est ainsi que j’ai vu un ami acquérir un 500mm f/4 L IS USM II de moins de 6 mois pour 2’500.- CHF, mais il faut dire que le propriétaire d’avant était une personne fortunée qui avait vu trop grand et qui, à la limite, l’aurait presque donné.
Mais ce genre d’occasions est aussi rare que de gagner le gros lot au loto!
Je vous conseille donc de vous méfier des occasions trop belles, parfois, être un peu trop méfiant peut vous éviter quelques désillusions et de gros regrets.
Conclusion :
Comme expliqué en introduction, mon article est loin d’être exhaustif, il faut le voir comme une aide, pas comme un mode d’emploi.
On pourrait écrire beaucoup d’articles sur ce sujet, tant la question est vaste.
De fait, si vous avez des questions, n’hésitez pas, je serais ravi d’essayer de vous répondre.
Dans l’autre sens, si certains de mes lecteurs ont des astuces, n’hésitez pas à partager, je me ferais également une joie d’ajouter à cet article les idées les plus pertinentes.
Bon courage et bonnes photos.